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Jean Hoffmann

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Les Éditions SATOR ont publié un livre qui porte le titre indiqué ci-dessus et qui a pour auteur M. Jean Humbert. Le débat autour de ce thème ayant déjà provoqué pas mal de perplexité et de regrettables divisions parmi les évangéliques, il nous a paru nécessaire d'examiner sommairement, à la lumière des Écritures, la thèse exposée.


A la recherche d'une synthèse

Biologiste et géologue, agrégé de sciences naturelles, Jean Humbert a voulu présenter une critique de ce qu'il appelle le néo-créationnisme [1] avec un plaidoyer en faveur de l'évolutionnisme théiste [2] ou créationnisme dit progressif. Membre responsable d'une église baptiste parisienne et longtemps président de la Commission des études dans l'Association Évangélique d'Églises Baptistes de Langue Française, notre frère n'ignore pas ce que dit l'Écriture au sujet de la création de l'homme à partir de la poussière de la terre (Genèse 2:7). Mais il s'est trouvé, dit-il, dans une sorte de schizophrénie intellectuelle inconfortable, et il a cherché depuis de nombreuses années à réaliser une synthèse entre l'évolutionnisme, considéré comme scientifique par ses partisans, et le créationnisme biblique. Jean Humbert a donc tenté d'harmoniser les deux en proposant l'hypothèse d'une création progressive qui suppose que l'homme a émergé de l'animalité sous l'action de Dieu.

On s'éloigne de l'enseignement biblique

Une telle hypothèse se heurte évidemment à l'enseignement biblique.

Jean Humbert en est bien conscient, puisqu'il dit lui-même : « Quand nous émettons l'hypothèse qu'un homme est né d'un être vivant précurseur (disons, faute de mieux, un pré-homme) par une mégamutation miraculeuse; nous semblons nous éloigner du texte de Genèse 2:7, et il est compréhensible que des chrétiens bibliques nous le reprochent. » (p. 203). Il reconnaît aussi que le créationnisme progressif qu'il défend « propose sur la manière utilisée par Dieu pour créer l'homme, une description apparemment différente de celle du récit biblique » (p. 203). En réalité, M. Humbert ne semble pas seulement s'éloigner du texte biblique, il s'en éloigne effectivement, et sa description de la création de l'homme n'est pas seulement apparemment différente de celle du récit biblique, elle l'est réellement. Mais pour lui, il s'agit là d'une lecture «naïve » du récit biblique (p. 203) « (telle qu'on peut la faire à l'école du dimanche ou au catéchisme) » ! (p. 21). Il ne ménage pas ceux qu'il nomme les néo-créationnistes et auxquels il reproche leur littéralisme, voire leur hyperlittéralisme, leur naïveté, leur simplisme, leur partialité, leur synthèse illusoire, leurs explications puériles et fantaisistes, (p. 180), leurs affirmations gratuites et leurs spéculations (p 156), qui les ont fait construire, toujours selon M. Humbert, un véritable roman. À leur interprétation traditionnelle, il oppose l'interprétation littéraire, emboîtant ainsi le pas à M. Henri Blocher, [3] qui a d'ailleurs accepté de préfacer ce livre. Ceux que H. Blocher qualifie d'anti-scientistes, Jean Humbert les traite de para-scientistes qui font de la pseudo-science (p. 157). Il les compare à certains auteurs fantaisistes dont les ouvrages ont été de grands succès de librairie (p. 157), et il jette aussi le discrédit sur la Création Research Society (Société de recherches sur la création), qui compte plus de 600 savants chrétiens diplômés de l'enseignement supérieur, et qu'il désigne comme un mouvement à prétentions scientifiques (p. 17). Tout cela nous paraît extrêmement désobligeant à l'égard de frères et de collègues attachés à la Parole de Dieu, et dont beaucoup ont sans doute reçu une formation au moins égale à celle dont peut faire état M. Humbert. Cela soit dit sans l'intention de porter atteinte aux compétences de J. Humbert qui présente dans son ouvrage une information scientifique fort intéressante que nous laissons à de plus qualifiés que nous le soin d'analyser. Les divergences apparaissent surtout au niveau de l'interprétation de ces données, des présupposés et des déductions avec lesquels on peut ne pas être toujours d'accord, même si l'on doit passer pour naïf, simpliste ou fantaisiste aux yeux de certains, qui ont sans doute oublié ces propos du célèbre biologiste Jean Rostand : « Les évolutions sont des contes de fées pour grandes personnes»!

Ne pas tordre le sens des Écritures

Ce qui nous intéresse en premier lieu, c'est l'aspect biblique de la question, et ce qu'entend M. Humbert par une herméneutique [4] renouvelée (p. 210). Il nous propose comme conclusion à son interprétation la paraphrase suivante de Genèse 2:7 : « Dieu a créé la vie en construisant une structure très complexe, stable et autoreproductible à partir des éléments chimiques minéraux. Au terme d'une très grande évolution biologique, qu'il a dirigée, il a fait surgir l'homme à partir d'un précurseur vivant, Il lui a donné son souffle de vie, un souffle différent de celui qu'il a donné aux animaux. » (p. 207). Mais que dit l'Écriture? À celui qui lit Genèse 2:7 sans aucun préjugé, il apparaît clairement que Dieu forma d'abord le corps humain à partir de la poussière de la terre, qu'il insuffla ensuite dans ses narines une haleine de vie et qu'ainsi l'homme devint un être vivant, ou une âme vivante, terme par lequel sont aussi désignés les animaux (Genèse 1:20, 21, 24 et 30). Si donc le corps de l'homme ne devint un être vivant qu'à la réception de ce souffle de vie, c'est qu'il ne fut pas précédemment un quelconque être vivant, autrement il serait écrit que Dieu prit un être vivant, animal ou pré-homme, et le transforma en homme. Ainsi, toute l'hypothèse évolutionniste théiste, ou créationniste progressive, s'écroule devant la Parole de Dieu, sauf pour ceux qui mettent en doute ce qui est écrit, répétant en quelque sorte le « Dieu a-t-il réellement dit? » de Genèse 3:1. Tout lecteur attentif qui compare la paraphrase citée plus haut à ce que dit l'Écriture, se rend vite compte de la façon dont on manipule ici le texte biblique pour faire passer une hypothèse qui n'a aucun fondement scripturaire. Avec de tels procédés on peut faire dire à la Bible n'importe quoi. Il se trouve malheureusement des responsables d'églises évangéliques et des professeurs souscrivant à des confessions de foi bibliques qui considèrent cette hypothèse comme une option acceptable au même titre que la doctrine de la création telle qu'elle est présentée dans l'Écriture, alors que l'une exclut manifestement l'autre. Car, si Dieu a créé l'homme directement à partir de la terre, il ne l'a pas produit par mutation à partir d'un précurseur vivant, animal ou hominidé. « Faut-il trancher ?» demande J. Humbert dans le sous-titre de son livre. Mais la Bible a déjà tranché et nous n'avons rien à retrancher ou à ajouter! Il faut dire que pour M. Humbert ce récit biblique est tout simplement symbolique, il constitue pour lui une « représentation figurée d'une chose réelle » (p. 208), ce qui ouvre la porte aux interprétations les plus fantaisistes d'autres faits ou doctrines bibliques. La chute de l'homme, la naissance virginale de Jésus, sa résurrection, son ascension, etc. pourraient alors tout aussi bien être comprises symboliquement, comme le fait d'ailleurs la théologie libérale. Pierre appelle cela tordre le sens des Écritures (2 Pierre 3:16).

Créés selon leur espèce (Genèse 1: 21)

Jean Humbert rappelle très justement que chaque être vivant, après avoir reçu de Dieu la vie, possède le pouvoir d'engendrer des êtres qui lui sont semblables (p. 26), et il signale à ce propos que l'expression « selon son espèce» est répétée dix fois (dans Genèse 1). Il ne relève cependant pas que 7 fois sur 10 cette expression ne se rapporte pas à la reproduction des espèces, mais à l'origine de chacune d'elles. En d'autres termes, la Bible affirme ici que les différentes sortes d'êtres vivants ont été produites telles quelles, c'est-à-dire sans qu'il y ait eu évolution des formes simples aux plus complexes. M. Humbert reconnaît quand même que pour prouver l'évolution il faudrait avoir observé l'apparition d'au moins une espèce nouvelle à partir d'une autre, ce qui n'a encore jamais été constaté. On constate plutôt la remarquable stabilité des espèces et l'absence de chaînons, c'est-à- dire de formes intermédiaires qui laisseraient supposer le passage d'une espèce à l'autre.

Ni scientifique, ni biblique!

Curieusement, après avoir exposé son hypothèse à force d'arguments à caractère scientifique interprétés selon les vues évolutionnistes, J. Humbert déclare que tout ceci n'est qu'un essai sans prétention, et que l'explication qu'il propose n'est pas scientifique (p. 215). Or, nous avons vu qu'elle n'était pas davantage biblique. Mais alors, qu'est-elle en réalité, si elle n'est ni scientifique, ni biblique, et que vaut-elle en fin de compte? Nous ne voulons mettre en doute ni la bonne foi, ni les compétences scientifiques de notre frère, qui dans sa conclusion, laisse apparaître une prudence et une humilité qui contrastent singulièrement avec certains de ses propos méprisants signalés plus haut. Nous regrettons simplement qu'il introduise dans son interprétation de la Bible des éléments qui sont non seulement étrangers des Ecritures, mais manifestement en contradiction avec elles.

Ne vous laissez pas troubler!

Disons pour conclure que le livre « Création / Évolution» est bien rédigé et qu'à première vue l'argumentation semble si bien menée qu'elle pourrait troubler et influencer ceux qui ne possèdent pas en la matière une connaissance et une foi solidement fondées sur la Parole de Dieu, pierre de touche de toute hypothèse et de toute doctrine. Puissent les lecteurs de cet ouvrage examiner sérieusement l'hypothèse avancée, et toute nouvelle herméneutique, à la lumière des Écritures, pour ne pas se laisser emporter insensiblement par le courant néo-évangélique qui, ouvertement ou imperceptiblement, met en doute ce que dit la Bible en provoquant de regrettables divisions jusque dans les rangs de ceux qui professent encore leur foi en l'autorité d'une Écriture totalement inspirée par Dieu, et de ce fait inerrante et infaillible.
SATOR semble avoir créé spécialement une nouvelle collection intitulée «Opinions» pour publier ce livre. Est-ce à dire que cet éditeur diffuse ces vues évolutionnistes théistes parce qu'il les partage, ou sortira-t-il un de ces prochains jours dans la même collection un ouvrage qui présentera le point de vue créationniste biblique?

Notes:

[1] M. Humbert appelle néo-créationnistes ceux qui pensent que la terre est bien plus jeune que ne l'affirment les évolutionnistes, et qui considèrent que tous les fossiles sont des restes des êtres que le déluge a anéantis.

[2] L'évolutionnisme théiste suppose que l'homme est le résultat d'une longue évolution, qui par mutations successives provoquées par Dieu, l'aurait fait sortir un jour du règne animal.

[3] «Révélations des origines », Presses Bibliques Universitaires.

[4] Herméneutique : science de l'interprétation des textes bibliques.


Remarque:

Sur la couverture du livre « Création / Évolution » on a reproduit les deux mains de la célèbre fresque de Michel-Ange représentant la création d'Adam sur la voûte de la chapelle Sixtine (Vatican). Mais sur l'original, l'index de la main droite du Dieu créateur effleure presque l'index de la main gauche de l'homme, tandis que sur ladite couverture le doigt de Dieu-est séparé de celui d'Adam par un espace présentant 25 bâtonnets de plusieurs couleurs et dimensions qui semblent devoir indiquer que l'homme n'est pas sorti directement des mains de Dieu, mais qu'il y a eu de multiples chainons intermédiaires. On a voulu mettre l'image - comme le texte biblique - en « harmonie» avec l'hypothèse évolutionniste, en tordant le sens des deux !